dimanche 6 novembre 2016

Au travers


Rivières, celles qui arrosent les vergers d'Arménie, celles qui en torrent ont façonné le Grand Caucase en Géorgie, celles qui ont creusé ces gorges pittoresques, telles celles du Vorotan en Arménie, rivière que  nous croisâmes et recroisâmes, ou celles de Varzia en Géorgie où nous passèrent deux journées. Justement, l'arrivée au gîte de Varzia demanda là de terminer le chemin à pied, en traversant un pont métallique qu'on aurait crû de loin sans protection aucune.

Au-dessus du Vorotan, un autre pont métallique bien plus long et à usage touristique enjambait la vallée profonde en ondulant ostensiblement pour l'amusement des adultes et le plaisir des petits (grottes de Khndzoresk, comme ça se prononce). Plus spectaculaire, excitation pour le petit et vue splendide pour les autres, le téléphérique 'horizontal' de Tatev, qui vole au-dessus de la vallée jusqu'au célèbre monastère (je sais, j'aurais dû résister pour le lien). Bien plus rapide que la route, ce téléphérique figure au Guiness Book (pardon, Guiness Site) des records.


Khndzoresk





Les torrents se traversent autrement, parfois à poutre comme sur la photo, mais plus généralement à pied, en sautillant-glissant de pierre à caillou. Inévitablement vint celui un peu plus gros (le torrent, pas le caillou) près de Juta (Kazbegi): déchaussés, courage à deux mains, chaussures dans la troisième main, ma fille et moi eurent l'eau jusqu'aux genoux, peinant à tenir face au courant, tenant le petit chou par la (quatrième) main -- pour lui c'était quasiment jusqu'à la hanche - merci Grand Soleil du Caucase pour ton action salvatrice.

Toujours dans la région, un de ces petits torrents, très raviné, fût trop difficile à franchir pour le cheval qui emmenait le petit - eh oui, nous eûrent ce plaisir et privilège d'une balade  à pas normal, puisque les propriétaires de ce magnifique "5th Saison" avaient gentiment accepté de nous louer le cheval sans guide, confiants d'avoir vu ma grande à la manoeuvre. Pour la petite histoire, le cheval traversa finalement plus loin, guidé par notre spécialiste, tandis que les messieurs déchaussèrent une fois de plus.

Au travers des montagnes: l'Ingouchie

Pont de la paix à Tbilissi

jeudi 3 novembre 2016

Stop-rencontres

Tellement facile en Arménie, on prit vite l'habitude de lever le pouce pour avancer plus vite ou pour atteindre des coins non désservis. Ce pouce fût l'occasion de l'une ou l'autre rencontre; pour ne pas ressasser sur les militaires à vive allure de la première chronique, changeons d'anectodes.

Trois jeunes, l'air plus déjantés que pieux nous embarquent en remontant du Sud, après avoir quitté Tatev et son monastère, déjà le deuxième véhicule du trajet. Musique rythmée dans la voiture, conversations enjouées, bref pas vraiment la monotonie. Et voilà qu'on s'arrête (ils nous ont prévenus, pas de lézard) au pied d'une butte dominant Sissian. Pourquoi donc?...Pour allumer quelques bougies au pied de la croix - encore un léger a priori déjoué. Peut-être sont-ils militaires aussi? Il y a une base à Sissian nous dit-on.
Notre dame de Sissian, au pied de la croix
La plus cocasse des rencontres eût lieu près de Varzia, sur une route peu fréquentée en Géorgie, en fait notre seule longue attente d'auto-stop (mal au pouce donc). Faisait chaud. Et la camionette qui s'arrête ! Yes, mais.. Derrière le chauffeur, à même le sol, un nombre indéfini d'adultes, ados, enfants. Plein. Montez, nous invitent-ils tous sourires dehors! On case donc nos gros sacs, on grimpe, le petit sur les genoux de je-ne-sais-qui. "Quand y a plus de place, y en a encore" - véridique. Les photos montrent qu'on y a bien ri là entassés par terre. La belle blonde (si, si, je remarque), souriante au mileu de tous, Géorgienne mariée en France, passe ses vacances en famille 'au pays'. Pour une fois, la conversation ne roule pas en russe (ce qui, en passant, me permet pour une fois de tenir tête à ma fille en fluidité). Par hasard de timing et de pause-café, on retrouvera la camionette vide un peu plus tard et le chauffeur nous déposera encore un peu plus loin.

En vrac, il y eût aussi le papa causant et son fils un matin à Dilijan, un entraineur de football à la voiture confortable (idem pour l'avocat pénaliste) et le fameux couple à la dame habillée en canari; charmants, visite d'un caranvanserail abandonné au col de montagne, photos de nous trois, mais surtout pas de photos d'eux ensemble...

Accessible en pouce

mardi 1 novembre 2016

Paix fragiles


Religion et politique dans une même (dé)chronique, c'est la vie. Visite de la cathédrale de Sameba (Trinité), érigée il y a ...quelques années, pour célébrer les quinze cents ans d'autocéphalie de l'Eglise orthodoxe géorgienne (info pour ceux qui ont la flemme de suivre le lien). Sameba donc, que certains diraient dominer la ville mais qui je crois resplendit sur Tbilissi. Malheureusement toujours aussi ignare en icônes, je m'attarde plutôt sur l'architecture, surtout belle par son extérieur. L'esplanade respire la paix, une invitation au calme intérieur, une lumière qui fait oublier le côté obscur des touristes en short (nous y-compris).


Pourtant la paix n'est pas gagnée dans ces contrées. Nous n'allâmes point au Nagorny Karabagh, dont l'Arménie est probablement la seule à reconnaître l'indépendance (même pas me dit Wikipedia, c'est surprenant), mais nous croisâmes des véhicules militaires sur l'unique route du Sud, sans oublier un matin le cortège présidentiel de grosses voitures noires remontant à vive allure et sirènes hurlantes vers Erevan, lors des évènements de prises d'otages. Les rivalités ethno-religieuses ont fait beaucoup de dégâts dans la région et on sent que les frontières politiques évolueront encore. Géorgie et Arménie, les deux pays sont majoritairement chrétiens dans une grande région plutôt musulmane; pour votre prochain 'Trivial Pursuit' (pour 'Minecraft', c'est moins utile), sachez que les deux Eglises partagent les trois même qualificatifs: apostolique (les apôtres André en Géorgie, Thaddée et Barthélémy en Arménie), orthodoxe (donc chrétienne, pour les distraits), et autocéphale (indépendantes). Ils partagent aussi l'esthétisme de leur alphabet national (cliquez Géorgien et Arménien) mais diffèrent fortemment par leur deuxième alphabet respectif (sur les poteaux de signalisation typiquement): latin-occidental pour la Géorgie, cyrillique-oriental pour l'Arménie, plus qu'un symbole du contexte politique, je pense.

Point de guerres ou de risques dans notre itinéraire, je le certifie pour rassurer les grand-mères (les nôtres, pas celles de l'autre chronique), mais un impact tout de même puisque nous dûmes ignorer délibérément certaines régions, Ossétie du Sud en tête, comme un grand trou sur la carte, en conflit, en plein centre de la Géorgie.

Puisse Sameba resplendir au-delà de Tbilissi, puisse le calme paisible des vieux monastères s'étendre par delà les sommets, puisse une paix complète gagner enfin ces  deux pays magnifiques.