vendredi 16 décembre 2016

Khinkalis



Cousin du pelmeni russe et spécialité géorgienne, on dirait une petite sacoche en pâte, au moins cinq centimètres de diamètre, refermée élégament par des plis serrés. Des variantes bien sûr mais le véritable khinkali est fourré de viande de mouton hachée aux herbes, coriandre en tête. A savoir: le khinkali se particularise par la présence de jus dans la sacoche, aspiré dès le premier croc après la prise en main. Décilieux quand authentiques, on eût la chance d'y gouter quand ils étaient préparés "pour eux" et pas "pour nous", de la main aimante d'une mère au four (sans moulin) pour l'anniversaire de son homme de fils - un regard chaleureux celui-là avec une tête absolument biblique, on l'imagine bien en apôtre barbu - non, en fils prodigue, voilà, c'est çà.

Fête d'anniversaire donc au "Fifth Season", maison d'accueil pour randonneurs déjà mentionnée dans ces chroniques, perchée en haut avec ses vues imprenables, mais qui reste humble face à Chaukhi, massif rocheux de la chaine principale du Grand Caucase. La fête semblait privée, organisée à minuit dans cette unique salle mêlant famille et migrants touristiques temporaires; mais l'invitation nous fût répétée et nous finirent donc par prendre place à la grande table une fois le petit confié à Morphée. Ambiance joyeuse évidemment, Maman au fourneau  ainsi qu'une autre dame (la composition familiale, qui donc travaille et qui donc est invité, est restée un peu mystérieuse), sans oublier grand-mère tout de noir vêtue, aux rides marquées mais avec la force pour bêcher un chemin sec, et qui dépose un bisou complice sur la tête de son hirsute de petit fils.

Khinkalis savoureux donc, c'est visiblement "la" chose à proposer pour cette célébration, mais aussi vodka (je n'abusai point cette fois),toasts prononcés par le maître de cérémonie, et accompagnement salés, surtout ce déliceux poisson sec-mais-pas-trop,  à mi-chemin entre la version russe très sèche et le fûmé scandinave mou. Demi-sec, comme le vin donc (pour ceux qui suivent). Le point délicat fût de s'éclipser au bon moment, ni trop tôt pour faire honneur à l'invitation, ni trop tard pour s'incruster dans leur fête. Au lit les migrants.

jeudi 15 décembre 2016

Tiblis à boire



Tiblis, appellation locale de Tbilissi qu'on identifie immédiatement comme "la" capitale du Causase. Ses monuments, sa grandeur, la rivière centrale surplombée du palais présidentiel, la citadelle de l'autre côté, rivière enjambée majestueusement par ce pont dela paix, ultra-monderne réussite. Puis le buzz qui distingue la capitale d'une ville de province, la vie qui bat son plein, toutes ces choses bien connues, mêlées ici au Sud, légèrement parfumé d'Orient.


Après la sieste et la dégustation nocture en cave ce soir là, je dormis peu et arpentai la ville dès 7h30, descendant d'abord le boulevant longeant les vieux murs de la ville, cherchant, vaguement d'abord, une terrasse ensoleillée pour un café et une déchronique à gratter. Point de chance, toutes les terrasses du même côté, à l'ombre, c'est le matin tout de même. Tour de ville, anciennes maisons pittoresques en bois, traversée des rues bar restaurant désertées, puis la place touristique en bas -- avec de belles tables au soleil - c'est même ouvert. Chouette. Hélas, les huit heures sont bien tassées déjà et déjà trop chaud pour y rester assis. Remontée par les pavés, en voici un autre ouvert ! Chouette. Re-hélas, c'est un Italien - pas top pour un café à la turque. Allez, enfin un autre, vrai Chouette. Grattage.

Revenons sur les magasins-caves, très répandus ici, faisant honneur à la réputation des vins géorgiens. Un serveur sympa, décapsulé par deux ou trois phrases en russe, me laisse tester deux ou trois vins avant de choisir mon verre. J'avais requis un rouge sec, même si le demi-sec est plus courant et plus courru, quoique sec par ici reste relativement doux par rapport au standard occidental. Très agréable au palais, assez long en bouche, un peu juste côté nez - et je n'y connais pas grand chose. La production locale semble abondante et de qualité, sans comparaison avec les productions des pays voisins, à ma connaissance. Mes amis arméniens ne m'en voudront pas, le vin géorgien est clairement supérieur, mais point de larmes: le cognac arménien est là pour leur fierté nationale.

samedi 3 décembre 2016

Espace nature


Vastes plateaux arméniens et Grand Caucase géorgien aux pointes aïgues et vallées déferlantes de torrents. Contraste et pourtant sentiment commun d'espace, de respiration, de liberté. Bien sûr les photos, le visuel, mais il ya autre chose - un peu de vécu évidemment. 



L'animal domestique. Voilà peut-être un de ces signes de cette liberté. Point de clôtures ou autres limites artificielles et, si ce n'est pour les moutons, point de "maîtres" non plus. Veaux et vaches paissent paisiblement là où leurs pas les guident. Bien sûr, "on" les rassemble généralement le soir mais cette impression de croiser parfois une vache seule au milieu de la montagne, élément clé de la photo pastorale prise aux lueurs matinales, cette impression finalement que "domestique" n'a pas vraiment la même signification ici.
Curieusement, nous avons plus ouvent croisé des petits troupeaux de veaux en Arménie, sans "adulte maternel" semble-t-il. Leur air un peu perdu, et la taille peut-être, la couleur rousse souvent, leur donnent un je-ne-sais-quoi de mignon, rarement attendu de bovins, occupés en d'autres contrées à regarder passer le train. Et puis ils aiment suivre les routes aussi, réclament leur priorité d'usagers faibles.


 Ma fille s'émerveille évidemment des chevaux en liberté qui, domestiques rappelons-le, se laissent souvent approcher en quête de quelque gratouillement. Plus nombreux dans le Grand Caucase, un peu aussi pour promener le quidam, mais sourtout pour des raisons purement logistiques. Pas des chevaux de trait, mais de véritable chevaux de charge grimpent les chemins montagneux le dos chargés de vivres ou autre chaise (vu), rendant de précieux services là où la voiture n'arrive pas, autant dire la quasi-totalité de Juta, où nous passâmes ces cing belles journées d'espace et de liberté.

Mal de mer

Partis en montagnes, dans une Arménie cerclée de terres, l'attraction des bords de mer pousse les enfants à me convaincre de diriger nos pas (enfin nos roues aussi) en Géorgie vers la mer Noire. Direction Batumi donc, station presqu'aussi célèbre qu'Odessa dans les pays de l'Est.

 Sans bobos auparavant, c'est bien là que nous bûmes la tasse, au propre comme au figuré, seul et peut-être inévitable pépin de santé du voyage. Revenons à la tasse: eau délicieusement chaude, l'enfant sautant sans bornes, emmailloté dans son gilet orange, baignades de très longues durées donc. Et Paf! Dans le piège comme de nombreux primo-arrivants (y a pas que les réfugiés qu'on appelle comme cela). Nos instestins succombèrent méchamment à cete ingestion forcée d'eau de mer (pas noire, bien bleue je vous l'assure). Demi-journée au lit pour les enfants, température la nuit, bref le tralala qui devait bien arriver une fois sur ce long périple. Demi-journée suivante, re-Paf! Cest mon tour, KO sans estomac et sans force, la grande fera les sacs pour deux en préparation du soir.


Eh oui, c'est justement le seul trajet réservé un peu en avance, la traversée en train de nuit de la Géorgie, d'Ouest en Est. Pourquoi ce soir didju (traduction: verdomme)? Départ 1h30, la nuit se passe sans encombres - on dort même - jusqu'au réveil disons brutal du petit qui rechute, avec effet visuel tangible dirons-nous. 7h du mat', nous titubons jusqu'au snack de cette gare-marché de banlieue perdue. Dix minutes plus tard, les deux dorment littéralement sur la table (si si, j'ai la photo). Que faire? La responsabilité paternelle me taraude. Temporiser à Tbilissi? Ce qui se traduira en deux jours à glandouiller à l'hôtel, vu leur état. Décision difficile et pourtant je les réembarque - autant qu'ils dorment dans le minibus si c'est pour dormir, espérant secrètement (les poches bourrées de sachet, on ne sait jamais) qu'ils y dorment réellement (gagné! na!) et que l'air des hautes montagnes à l'arrivée ferait ses miracle. Pari osé (le petit se tenait le ventre au départ) mais réussi: tous deux en grands sourires et gambadant allégrement à l'arriéve. Pffiou! Avait pourtant eu difficile à me convaincre moi-même...